Figure de proue de la nouvelle photographie chinoise, l'artiste Lin Zhipeng, basé à Pékin et né à Guangdong en 1979, reflète un certain esprit de la jeunesse chinoise du millénaire et son rejet des conventions. Son pseudonyme, n°223, est emprunté à la matricule d'un flic solitaire qui croise la route de Brigitte Lin, fausse blonde et vraie trafiquante de drogue dans le film Chungking Express de Wong Kar-Wai. Ici, au cinéma ou en photographie, la fausseté du drame et les rebondissements construits pour notre divertissement soulignent autant un jeu autour des genres et de leurs frontières que le pouvoir de la fiction à toucher la réalité. Outre le nom d'un de ses personnages, une certaine capacité à jongler entre les cultures chinoise et occidentale, et un attachement inconditionnel à la marginalité, ce que Lin Zhipeng partage avec le cinéaste hongkongais, c'est précisément cette capacité à jouer avec les mécanismes du populaire tout en proposant des images et des histoires sincères.

Avec Lin Zhipeng, tout est teinté d'une séduction résolument pop. La couleur, les formes, les textures, les cadrages utilisés sont tous symptomatiques d'une culture visuelle bercée par le flux d'images, de corps et de symboles qui a marqué notre entrée dans le deuxième millénaire. Loin de la critique traditionnelle et peu constructive d'une "surconsommation" ou d'une "saturation" d'images, celles de l'artiste célèbrent la vitalité de sa génération, à commencer par la mise en scène de sa vie et de celle de son entourage. Mêlant amour et chaos, fantaisie et érotisme, ses photographies agissent comme le journal poétique collectif d'une génération désireuse d'échapper aux pressions sociales et d'aspirer aux plaisirs de la vie dans une société aussi indifférente que rapidement évolutive.

"Feed" en perpétuelle mutation tantôt documentaire, fictionnelle ou conceptuelle, les photographies de l'artiste posent les éléments récurrents d'une pratique volontairement éclectique : portraits ou paysages au flash, photographies nocturnes et aquatiques, nus, natures mortes ou animaux se superposent, se combinent ou même se confondent. Si le cœur de sa pratique reste marqué par le nu, tant féminin que masculin, ses travaux récents montrent le développement d'une recherche picturale qui explore toutes les formes de vie. Humain, végétal, animal ou objet composent ensemble une philosophie de la transposition et de l'empathie. En ce sens, l'artiste affirme : "Les humains et toutes les choses du monde sont égaux, et les corps humains et les choses naturelles sont également égaux. Tout comme les humains, les fruits, les fleurs et les animaux ont leur propre vitalité, et ils connaîtront la croissance et le déclin jusqu'à la mort et la disparition. J'espère pouvoir comparer la vitalité des animaux et des objets au corps humain, qui possède certaines pensées et émotions." Au-delà de celle de toute une génération, c'est la vitalité comme énergie ou comme réalité fluide que l'artiste capte.

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